Visite de Plantu au lycée Colbert
Le lycée Colbert a reçu la visite de Plantu lundi 3 février 2025. Des élèves de seconde (2B et 2E) et de première (1D), accompagnés de leurs professeurs, lui ont posé des questions sur son parcours professionnel, sur la liberté d’expression, la censure et l’autocensure.
Après leur avoir montré une photographie de lui posant aux côtés des dessinateurs de Charlie Hebdo assassinés en 2015, il en a profité pour encourager les élèves à s’exprimer librement sans se laisser intimider ni manipuler, notamment par les réseaux sociaux. Plantu lui-même ne s’est jamais interdit de dessiner ce qu’il voulait et a toujours ri de tout, sans se fixer de limites. Il a cependant dû composer avec les contraintes de l’actualité et les unes décidées par la rédaction du journal.
Après s’être rapidement présenté (bac scientifique, école de dessin en Belgique, entrée au Monde en 1972, difficultés financières des premiers temps, fondation de Cartooning for Peace), Plantu a projeté au tableau deux dessins d’élèves de seconde B, Nathan Aubigny (un arbuste dénudé dans un pot fissuré, avec pour seul fruit, une planète sur le point de tomber) et Bertille Geschwine (un rouge-gorge chatoyant sur de toutes petites pattes délicates) pour les commenter, les féliciter et les encourager à poursuivre dans cette voie.
Puis il a tendu le micro aux élèves qui lui ont demandé si son style avait évolué depuis ses débuts. Oui, beaucoup : le trait simple et naïf de sa première colombe de la paix dessinée en 72 au moment de la guerre du Vietnam n’a que peu à voir avec le coup de crayon énergique et reconnaissable entre tous des dernières années. Un autre élève a voulu savoir quelle était la caricature dont il était le plus fier. Ce dessin n’est pas de lui : il s’agit des drapeaux palestinien et israélien dessinés en couleur par Yasser Arafat et Shimon Pérès en 1991 et 1992, rêvant à la création de deux États coexistant pacifiquement côte à côte, le dessin ayant cette qualité, que n’ont pas toujours les mots, de désamorcer par son caractère premier, presque enfantin, les enjeux les plus cruciaux et les plus graves. Un autre élève l’a interrogé sur la souris apparue dans les années 90. C’est en réaction au mépris d’une rédactrice en chef que Plantu s’est inventé cette petite souris qui, comme une compagne de route, lui a souvent donné l’occasion d’exprimer ce qu’il ne pouvait pas représenter dans le dessin principal. Avec sa tablette, Plantu a alors dessiné en direct deux souris, l’une souriante et l’autre féroce, aux dents acérées. Un autre élève encore lui a demandé si on avait déjà refusé de publier l’un de ses dessins. Plantu ne s’est pas privé de montrer à l’assemblée, un brin provocateur, des dessins représentant Dominique Strauss-Kahn, candidat à la présidentielle française et accusé de viol en 2011, le teint verdâtre, en robe de chambre, un préservatif usagé au pied, ainsi que tous les dessins plus explicitement sexuels, et écartés par la direction du journal, provocant l’hilarité de l’assemblée…
Abordant tour à tour l’importance des valeurs républicaines et de la liberté, mais aussi à titre plus personnel de la sincérité, de l’abnégation et de la persévérance, il a ponctué la séance par quelques autographes et la distribution de dessins dédicacés.